mercredi 11 août 2010

Pierre et la Mort V

Pierre aimait le regard froid et net des statues de pierre, et venait fréquemment parler aux visages graves et monolithiques qui parsemaient cette vieille chapelle pour se reposer des regards fuyants et troubles de ses congénères. Alors qu’il conversait profondément avec un quelconque saint barbu, un pas léger résonna lourdement, comme bondissant d’arche sans faire de manières jusqu’à Pierre qui en perdit le fil de son argumentation. Irrité, il décida au terme d’un procès mental expéditif de chasser l’intrus d’un volte-face féroce et d’un regard fuligineux. Ce qu’il tenta, sans succès puisqu’il n’y avait personne. Son irritation se doubla d’un certain désappointement et il demanda sans plus de cérémonie d’une voix haute et claire si quelqu’un d’autre que lui se trouvait là. Et il y eut une réponse, immédiate, qui situait le nouvel interlocuteur juste derrière lui. Pierre fit à nouveau volte-face pour se trouver nez-à-nez avec la mort, la Mort pardon, dans son acceptation chrétienne et allégorique la plus courante en tous les cas, la grand faucheuse avec son crâne vide et encapuchonné, quoiqu’elle n’était plus faucheuse que de nom puisque de faux, elle était dépourvue.
Pierre nota mentalement tout en commençant à reculer instinctivement que la Mort avait une voix masculine légèrement nasillarde et teinté d’un très léger accent sur lequel il ne parvenait à mettre de nom, de région, d’ethnie. Un pays d’Europe de l’est peut-être ? Et alors que Mort pointait sur Pierre un doigt accusateur, il remarqua également qu’elle portait une belle montre en argent (ou peut-être en aluminium) . Repérant peut-être son regard appréciateur, la Mort leva le poignet pour présenter son horloge qui avait deux particularité notable, outre celle d’elle d’être portée sur un bras dépouillé de chair, deux tiges osseuses donc, deux particularités dont la première était le mouvement des aiguilles, fluide, rostres métalliques glissants sans le moindre à-coup, ce qui, pensa Pierre, donnait une idée bien plus réaliste et donc terrible du temps, qui se moque de la « question de point de vue » et glisse régulièrement, comme nous-mêmes sur la pente d’un gouffre dont les parois brutalement verticales nous abîment tôt ou tard. La seconde particularité était le nombre d’aiguille. Innombrables, pour autant que Pierre pouvait en juger, car certaines était si rapides qu’elles ne laissaient qu’une impression floue au regard piégé dans sa temporalité particulière. Leur nombre pouvait être infini dans l’infinitésimalité au delà de l’heure classique, de la minute familière, de la seconde sympathiquement empressée. Les hautes dimensions du temps n’étaient pas figurées, l’homme était sans doute trop infime pour que l’éternité se penche plus bas.
De fait, Pierre était également horrifié et captivé par cette ronde infernale et miniature et reculait mécaniquement sans pouvoir articuler la moindre parole. La Mort, elle, avançait d’un pas imperceptible et comme lévitant, émettant régulièrement ce son léger, comme le soulier d’un enfant aux jambes immense, ce pas factice de marionnette. De cette voix nasillarde, la Mort annonça à Pierre sa mort prochaine à la manière d’un médecin expliquant à son patient le déroulement d’une opération alors qu’il est déjà trop tard pour faire machine arrière. Pierre eut alors l’impression que le monde gelait autour de lui, qu’il se cristallisait . Tout le monde. Sauf la Mort, qui n’était pas le monde. Il vit nettement la montre ralentir. L’une après l’autre, les aiguilles jusqu’alors trop rapides pour être suivies du regard apparurent et bientôt il y eut tant d’aiguilles qu’elles en étaient indiscernables. Fasciné, Pierre se rendit à peine compte qu’il avait à présent complètement cessé de bouger, ou plutôt qu’il bougeait si lentement qu’il ne le percevait plus. Son cœur battait la chamade au rythme d’au moins trois battement par seconde, et il comprit qu’il n’atteindrait jamais la prochaine seconde. Il pensa une chose, puis pensa qu’il était futile de penser s’il n’aurait plus l’opportunité de s’en souvenir, et il pensa enfin que les statues manquaient définitivement de compassion. Puis son corps s’effondra, et la Mort disparût.

mercredi 7 juillet 2010

Pierre et la Mort IV

Pierre n’avait jamais eu peur des chiens, pourtant. Elle-même avait un chien, un petit bâtard adorable qui l’attendait gentiment dans sa petite maison. C’eut été un comble, tout de même. Pendant un instant, Pierre imagina le maître qui aurait eu une peur panique de son propre chien. Sa vie serait un enfer. Le clébard, rendu vicieux et sadique par le pouvoir qu’il possèderait sur son maître, maintiendrait un régime de terreur et règnerait sans partage sur la maison, choisissant les programmes à la télévision et obligeant le pauvre humain à coucher sur une paillasse malodorante tandis que lui se vautrerait sur le lit moelleux sans hygiène ni vergogne. Le “maître“ serait contraint de payer chaque jour un tribut en viandes de premier choix et de nettoyer les déjections du véritable maître des lieux qui, ne prenant même plus la peine de sortir, se laisserait aller dés que l’envie lui en prendrait. Cette pensée aurait fait sourire Pierre si cet affreux cabot avait bien voulu la lâcher un peu, ce chien aboyant et courant et grognant d’une colère inhumaine, longeant le grillage éperdu de frénésie. Il s’y jeta même à corps perdu, rebondissant d’une façon qui aurait également pu être comique, si elle n’avait pas été terrifiante. Terrifiante. Pierre était bien terrifiée. Elle n’avait peut-être pas habituellement peur des chien, ce n’était peut-être pas la première fois qu’elle était ainsi houspillée par un chien de garde lors d’une de ses promenades dominicales, mais cette fois, cette fois, et puis ce chien là. Elle doubla ses pas, puis les tripla et commença à courir. Le chien la poursuivait, puissant même encore impuissant. « Il est long comment, ce foutu jardin ? », hurlait Pierre dans sa tête. Le chien gueulait comme une meute. Les yeux révulsés, les babines retroussées deux ou trois fois. Jamais Pierre n’avait ressenti envers elle un tel désir de tuer, son cœur l’assourdissait. Elle arrivait au bout de la propriété. Enfin. Un portail. Ouvert.

Comme dans les cauchemars, Pierre envisageait et pesait ses options en un éclair, comme dans les cauchemars, chaque option était mauvaise. Courir de plus belle. En deux bonds il la rattrape. Faire demi-tour. Trop tard : il a vu la faille. Faire face. Peine perdue. Puis le regret : pourquoi ne pas avoir simplement fait demi-tour ? Quel orgueil déplacé l’avait fait longer ce jardin en entier ? Ce n’était qu’une promenade. Mais là bas, sur le palier de la maison, une vieille, blême, la vieille. Sauvée. D’un mot, elle calmerait le chien, qui n’était somme toute pas si méchant. « C’est la chaleur, vous comprenez ». Le chien est sous la table, c’est vrai qu’il n’a pas l’air si méchant. « Buvez ça ma pauv’ dame, ça vous remettra ». Puis « au revoir, pardon encore pour Napoléon. Dis pardon Napo. Dis pardon à la dame. ». Sauvée. Ou alors non, elle ne dit rien. Ou si peu, le chien couvre tout. Il est si proche que Pierre ne s’entend plus penser, ou alors elle ne pense plus. Le chien est sur elle, elle ne s’est même pas sentie tomber. Il mord et arrache, il entaille et lacère. C’est interminable. Pierre perd soudain la vue. Puis l’ouïe. Puis, elle ne sent plus rien. Plus de douleur . Et finalement, plus rien du tout.

lundi 17 mai 2010

Pierre et la Mort III

L’œuf au plat de Pierre avait pourtant eu précisément le même goût qu’à l’accoutumée, ce matin-là. Comment pouvait le goût de ces si familiers résidus de poules mal baisées être la dernière sensation agréable de la vie sensible de Pierre ? Enfin, Pierre n’était pas mort, pas encore ; son corps s’était effondré sans crier « garde ! » quelque part entre les toilettes et la porte d’entrée ou de sortie. Les œufs étaient frais, pourtant. Qu’est-ce qui lui avait pris, saloperie ? Pierre était toujours bel et bien conscient. Il n’avait rien à se reprocher, nom d’une putain, quoi, mais quoi ? Cela lui rappelait les fois où sa voiture tombait en panne sans raison apparente. Un instant elle tournait comme un lapin à une patte, l’instant suivant elle laissait tout tomber. Le niveau d’huile est correct, l’essence idem. Un truc a lâché, elle s’est éteinte. Le corps de Pierre s’était éteint. C’était une panne générale, sans savoir comment, il le sentait. Il sentait donc qu’il n’avait plus beaucoup de temps. Il sentait son cœur agoniser. Depuis qu’il était tombé en panne, il n’entendait plus que lui, résonnant comme une percussion folklorique dans un décors urbain désert. Après s’être fait de plus en plus erratiques, comme une connerie de chef-d’œuvre progressif déconstruit, ses battements disparurent. Pierre s’attendait à l’assourdissement d’un authentique silence inédit, il fut déçu. Dévoilé par la lourde pulsation infrasonique, son système nerveux laissa doucement résonner sa voix sifflante et grésillant, portant la musique à des sommets conceptuels à la noix. Pierre était de méchante humeur à présent.
« Mon cerveau fonctionne encore non ? Je pense donc je fonctionne, c’est pas ce que disait Platon ? Ou Nitse ? Nietche ? Nitz... Je ne sais plus. J’ai oublié. Est-ce parce que mon esprit s’éteint, ou parce que le lycée est un peu loin ? Comment cela sera-t-il ? Vais-je disparaître peu à peu, perdre du moi, m’y accrocher désespérément et voir les fragments brûler entre mes doigts ? Ou bien cela sera-t-il instantané ? J’ai l’impression que je le sens... Je n’entends déjà plus mon cerveau fonctionner. Ce n’est pas le silence que j’attendait, juste une absence de ce que peut-être un son, comme si j’avais déjà oublié ce que c’est « entendre ». J’ai l’impression que je le sens... J’ai l’impression que je sens que je meurs. Que je meurs. Oui. ça vient. Je suis digne. Je meurs.
« Je suis mort
...
...
...
...
...
...
...
...
...
... « non, attends. Quoi ? Je suis mort. Mais non. Ou bien si ? Peut-on mourir et le constater ? Ca me revient maintenant. Nietzche. « Je pense donc je suis ». Non, Descartes. Je pense? Il semblerait. Alors je suis ? Alors j’existe – encore ? Est-ce que je vis après la mort ? Est-ce que je subsiste ? Est-ce qu’il reste quelque chose de moi ? Il y aurait une réalité au delà de la matière. Je fais partie de cette réalité. Je suis pur esprit. Je suis libéré. Ce n’est plus qu’une question de temps pour que ma conscience se transcende et s’étende au delà des limites désormais révolues d’un corps faillible. Mais alors je serai infini. Peut-être suis-je l’élu. Peut-être suis-je Dieu. Ou bien... Ou bien je ne suis pas encore mort, mais ça ne saurait tarder. Je gâche mes derniers instants à rêver d’eschatologie dérisoire, et bientôt le néant. Faites que cela soit la première solution. L’existence après la mort. L’Existence après la mort. Faites que cela soit la première solution. Qui prie-je ? S’il n’y a rien, il n’y a personne à prier. S’il y a quelque chose, pourquoi prier ? Qu’espère-je ? Que cela soit ainsi. Faites que cela soit ainsi. Faites que cela soit la première solution. Faites que cela

dimanche 9 mai 2010

Pierre et la Mort II

« Voilà M Pierre, je ne vais pas y aller par quatre chemins : je serai franc. Ce n’est jamais facile d’annoncer ce genre de nouvelle, aussi j’irai droit au but. Je vais donc vous dire franchement... » Pierre avait cessé d’écouter presque dés les premier mots. Il n’avait pas besoin de s’entendre dire qu’il était condamné. La seule chose qui l’intéressait était de savoir de combien de temps il disposait encore. Laissons le médecin annoncer de la manière à laquelle il est accoutumé la sentence, à sa manière professionnelle et officielle qui devait bien, après tout, être la meilleure. Combien de temps, donc ? Combien de jours, mois, années ? Pierre tâcha de se rappeler depuis combien de temps déjà il aurait pu déceler en lui le cancer prudent, la petite bête qui ronge, et quand bien même ? S’il avait gagné deux mois ou même un an ; il songea avec humour qu’il aurait peut-être guéri pour mourir d’autre chose plus tôt encore. Aurait-il été, pendant ses derniers jours, plus vivant car moins mortel en terme de probabilités ? C’était du pareil au même, après tout. A cet instant, Pierre se sentait serein, s’en étonna lui-même jusqu’à ce que tombe « il vous reste » l’échéance « ... six mois » qui lui parut alors « peut-être huit... » intolérable. Trop court, la question n’était pas là – dix ans seraient trop court également – , non, ce que Pierre ne tolérait pas était que son temps fut figé de la sorte. Il avait toujours considéré inconsciemment que sa fin serait, dans son instantanéité le plus grand espace de liberté de son existence, qu’il fut assassiné ou écrasé par un arbre, qu’il tombât d’une falaise ou qu’il attrapât au vol une balle perdue, il détestait alors cette mort tout à la fois programmée et annoncée et indépendante de la volonté de quiconque. Il se crispa et devint blême ; se méprenant (ou se méprenait-il ?), le médecin posa sur son épaule une main qui se voulait rassurante « nous ferons tout pour que vos derniers moments soient les plus confortables possible ». Pierre était si scandalisé qu’il l’en aurait frappé en plein visage. Un mot de plus et...
Cinq mois et une semaine plus tard, Pierre était dans un état critique. Il peinait à s’exprimer, forcé d’ôter son respirateur, et n’avait que de courtes périodes d’éveil. Il ne lui restait que très peu de temps, et il songeait qu’il était en avance sur les prévisions. Il avait toujours été précoce. A huit moi, il marchait. S’il avait su alors, apprenant déjà à lire, sautant une classe, s’il avait su alors qu’il se précipitait vers sa fin. Peut-être aurait-il prit son temps. Cette idée n’avait aucun sens, et Pierre en avait une conscience amusée. Il observait avec une forme de tendresse son esprit tâcher de plus en plus laborieusement de formuler un maximum de pensées. Tout se confondait en mille choses. Il s’était tassé et morcelé pensait le contraire de ce qu’il pensait. Ses amis avaient été là. Sa famille également. Et le notaire. Sa visite fut désagréable ; l’homme était lui-même charmant, et Pierre n’était pourtant pas matérialiste. D’aucuns diraient même de lui qu’ « il donnerait sa chemise ». Organiser l’éparpillement de ses biens lui donna pourtant l’impression de se défaire, il se dissolvait, ce qui semblait beaucoup moins digne que de mourir.
A droite, deux de ses meilleurs amis. A gauche, sa mère et sa sœur. Tous autant qu’ils étaient, ils pleuraient ; Pierre sourit faiblement, ce qui était sa manière d’être désolé pour eux. L’un tenait sa main, l’autre l’autre. Cela le gênait un peu : il se sentait christisé. Mais enfin, c’était bon de les sentir près de lui, tout près. Cela faisait quelque temps maintenant qu’il ne parvenait plus à soulever les paupières. Il entendait un sifflement. Un long bip persistant. Cela lui paraissait ne jamais vouloir s’arrêter. Il ne percevait plus que ça, à présent. Il n’y avait que ce bip qui résonnait de plus en plus fort dans un espace sans limite. Puis cet espace se resserra sur cet ultime réveil qui marquait la fin de ce qui lui paraissait à présent comme un très long rêve, le rêve d’une vie. Se resserra, puis l’étouffa, et le silence.



Bonus ending trouvé écrit d'une main aléatoire dans le carnet; ça se passe juste après "peut-être aurait-il prit son temps.": A quoi BON être prendre de l'avance, à quoi bon être le meilleur si l'on ne finit que brave. Juste Brave. MERDE DEGUEU-LASSE!! JE LAISSE TOMBER C'EST FINILE!!

vendredi 7 mai 2010

Pierre et la Mort I

Pierre était, comme très souvent, pressée. Elle n’était pas sujette au surmenage, son emploi d’aide à domicile n’était pas très contraignant, quoiqu’un peu ingrat. Elle ne travaillait pas tant que ça, d’ailleurs, elle avait peu de besoins et ses loisirs, qui consistaient essentiellement en des jeux vidéo en ligne, ne risquaient pas de la ruiner. Et puis, ses parents étaient toujours prêts à la soutenir les jours de vache maigre ; c’était de braves gens qui aimaient leur fille, et s’ils s’attristaient de ne la voir cultiver d’autre ambition que les objectifs ponctuels de ses jeux et de ne fréquenter d’autres personnes que les figures bigarrée et stylisées qu’elle rencontrait dans ses univers virtuels, ils n’avaient guère le cœur à lui tenir tête, car après tout « elle n’a que vingt-sept ans ». Si Pierre, donc était si régulièrement pressée, c’est tout simplement parce qu’elle ne voyait jamais le temps passer lorsqu’elle jouait et qu’elle finissait généralement en retard, ce qui la conduisait souvent à devoir courir. Pierre détestait courir et comme toujours lorsque sa vie lui était pénible, elle songea au monde romantique dans lequel, au moins, elle était quelqu’un. Dans ce monde elle était forte, belle, fière, riche, bien entourée. Dans ce monde elle vivait, lui semblait-il, elle existait pleinement, et elle enrageait d’être forcée de subsister de plain-pied dans cette réalité terne et nauséabonde pour pouvoir y accéder. Le feu venait de passer au vert. Hors de question qu’elle attendit. Elle courut. Un deux-roues pressé accéléra de toute ses forces et, comme tous les deux roues, roula en direction du piéton au milieu de la route. Il frôla Pierre qui, ne l’ayant pas vu arriver, fut désorientée et un peu paniquée. Pierre se sentait en danger et réagit maladroitement. Elle lança sa jambe gauche trop vite alors qu’elle était déséquilibré justement de ce coté, elle bascula alors de plus belle, dépourvue d’appui et, dans sa tentative instinctive mais piteuse de se rétablir sur la mauvaise jambe, tomba pour de bon sans avoir hélas le réflexe primaire mais salutaire de lâcher ses deux sacs qu’elle portait de chaque coté pour libérer ses mains et protéger son visage du contact imminent avec la chaussée. Ses pensées étaient si brusquées et accélérées qu’elles lui paraissaient suraigües, elle vit le rebord du trottoir se précipiter vers elle comme une mauvaise blague et se sentit un peu écœurée, tout à coup. Puis elle eut mal, un douleur qu’elle n’imaginait pas possible, qui lacérait sauvagement le dernier écho de ses rêveries vidéo ludique, il lui sembla alors que cette seule impression de souvenir d’idée de pensée qui se déchirait représentait tout son être, et c’est bien ainsi que tout finirait. Ce fut une angoisse vive et perçante qui demeura étrangement persistante lorsque tout le reste avait déjà disparu : sa peur de mourir fut la toute dernière part d’elle-même à subsister, un fragment d’instant, et Pierre n’eut pas même la chance de savourer l’ironie dérisoire de ce constat. Elle mourut.

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